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C'est en 1983 qu'un producteur de New York amateur de ces travaux lors des Parachute years, Yale Evelev, propose à John Zorn de s'atteler à reprendre des compositions du grand maitre italien à sa sauce. Ce dernier se voit comme un compositeur et un improvisateur, pas comme un interpréte : il refuse, pensant de toute façon que la musique de Morricone est "trop parfaite". Il est vrai que Ennio Morricone est un des plus grands (le ?) compositeurs de films de tous les temps, Zorn le sait et demeure un grand fan. Selon lui, le compositeur italien est l'un des premiers à avoir intégrer les éléments du post-modernisme musical au sein d'un langage personnel, et d'avoir réussi à conjuguer musique avant gardiste et succés retentissant.
En 1983, Zorn fut egalemment approché pour la ré-interprétation d'un morceau de Thelonious Monk "shuffle boil". Réunit avec ses musiciens en studio, il exécute le boulot, mais réalise aussi toutes les possibilités exploitable en studio, ainsi que le fait qu'il exploite à 10 % les capacités de ces brillants collaborateurs. Comme le projet Morricone devait être en partis produit par Evelev, Zorn changea d'avis, ravi à l'idée de retourner en studio d'une part, et de l'autre de bosser sur des pièces de son idole.
La casting de musiciens demeure tout simplement incroyable. Zorn voulait le plus de musiciens possible pour exploiter un maximum de possiblités et faire en sorte que les titres soit différents : rendez vous pris avec Fred Frith, Bill Frisell, Wayne Horvitz (trois futurs Naked City), les proches Anthony Coleman, Polly Bradfield, Bobby Previte, Christian Marclay, Carol emmanuel, David Weinstein, Guy Klucevsek, Cyro Baptista etc. Puis des bonnes surprises : Ned Rothenberg qui n'était plus à NY à l'époque, le retour d'Anton Fier, une présence de Michihiro Sato (qui avait signé la première collaboration duo avec Zorn), Tim Berne, Big John Patton en personne et même la Harpie Diamanda Galas qui gratifie de sa voix possédée un titre. 10 titres furent d'ailleurs mis en boite, tout plus brillant les un des autres. Zorn est arrivé à clairement intégré sa culture musicale à des titres d'obédience contemporrain, afin de mieux les déformer et le remanier à son goût. Bloc noise, improvisation libre, musique de films d'horreur, déviances soul jazz, mélodies folk japonaise, transgressions de duck calls, guitares hurlantes à résonnance métalliques, tout ça toujours sur fond de Morricone. C'est du trés grand art.
La rencontre fatidique entre John Zorn et "il Maestro" eut lieu. Zorn en apprit beaucoup, notamment sur la composition de musique de films, qu'il mettra d'ailleurs en application trés vite tout au long des 20 ans de la série des filmworks (dont le premier démarrera en 86, soit peu aprés la rencontre). Et coup de bol, L'album a été encensé par Morricone : « C'est un disque qui a de fraîches, bonnes et intelligentes idées. Il s'agit d'une réalisation à un haut niveau, un travail réalisé par un maître aux grandes fantaisie, connaissances et créativité... Beaucoup de gens ont fait des versions de mes morceaux, mais aucun ne l'a fait comme cela ». Le disque vit le jour sur Icon, sous division d'une major, et fût un succés immédiat, tirant Zorn d'une certaine confidentialité New Yorkaise jusque la, et l'amenant sur les sentiers d'une reconnaissance mondiale, et ceux grâce à l'un de ses héros musicaux...
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