lundi 31 décembre 2012

JOHN ZORN - Filmworks XVI (Workingman's death)


Poursuite rétrospective de la serie des filmworks de John Zorn, débuté en 1986 et se poursuivant inlassablement de nos jours. On retrouve tout cette serie dans la archival serie de Tzadik, qui couvre tous les enregistrements que sort le compositeur new yorkais de nos jours. Le Filmworks XVI date de 2005, et couvre la bande son d'un autre documentaire choc de Michael Glawogger qui s'intitule "Workingman's death".
 
Un documentaire réellement impressionnant de par son graphisme, sa réalisation et de son contenu global : mettre en lumière les métiers physiques et dangereux dans certains pays, alors que tous ont disparus dans les sociétés occidentales. Composé en six chapitres, le film nous emmène en Ukraine dans le quotidien des mineurs, en Indonésie, au Pakistan, en Chine, et sur le marché aux viande de Port Harcourt au Nigeria (certainement le plus visuellement effarant, la video est en ligne sur le tube). La variété des lieux renforce la difficulté de faire une bonne bande son.
 
Quand le réalisateur contacta John Zorn, il montra très peu d'enthousiasme : en train d'écrire une nouvelle pièce classique, finissant les 300 morceaux du book of angels, il ne voulait pas se disperser de ces objectifs. Ni une, ni deux, Glawogger prend le premier avion Vienne-New York afin de convaincre le gourou de l'east village en personne ; il est reçus courtoisement mais brièvement, une discussion, un bon repas indonésien, et le voila repartis le lendemain sans avoir vraiment eu de réponse. Puis Zorn se repenche sur la question les semaines suivantes, regardant le film plusieurs fois, admiratif du montage et du contenu choc du documentaire. Une bande son se dessine : étant donné le poids considérable des images, les mélodies semblent inappropriés, les percussions sont donc adoptés (variant et adaptées selon les pays en question), ainsi que l'ajout d'éléments électroniques pour compléter le coté moderne du film.
L'appel des musiciens est assez logique : Cyro Baptista aux percus (qui est présent sur quasi toutes les bandes sons), Ikue Mori pour le laptop, Zorn à l'orgue et percus, Jamie Saft à l'enregistrement et au piano. La dernière plage (avec guitare et basse) fut rajouté à la demande du réalisateur qui voulait un générique de fin plus rythmé. Au final, une bande qui tranche radicalement avec les filmworks easy-listening dont John Zorn nous a habitué : Percussions tribales se mélange avec les "Zorn chords" sombre à l'orgue, tandis que Mori livre des plages ambiantes inquiétantes. L'ensemble fonctionne bien, autant musicalement parlant qu'incorporer dans les images du documentaire. Peut être pas le meilleur chapitre de la série, mais un bel épisode de réflexion de Zorn pour son talent de compositeur de films...
 

vendredi 28 décembre 2012

JOHN ZORN - Rimbaud


101eme référence de la section Archival series, qui classifie tous les travaux de John Zorn, de ses début en 1973 jusqu'à aujourd'hui. Packaging new era de Tzadik, Superbe une fois de plus et dans la même veine que "Mount analogue", l'impression d'un livre relié façon vieux manuscrit, avec des portraits de Rimbaud à l'intérieur et les descriptifs d'usage. Je ne surprendrai personne en dévoilant que ce disque est un hommage au poète français du même nom, et plus particulièrement à quatre de ces poèmes marquants qui correspond aux quatre compositions du disques qui dépassent toutes la dizaine de minutes.
 
On connait l'amour de John Zorn pour la littérature française et ses protagonistes (les multiples pièces classiques avec des titres en français), c'est en 2012 avec un disque complet que le maître new yorkais revient, hommage appuyé à Arthur Rimbaud. "Bateau ivre", composition classique contemporaine conduite par Brad Lubman (le chef d'orchestre quasi attitré de Zorn) interprété par 7 musiciens et enregistré en live au Miller theater en décembre 2011 à NY lors d'une résidence de Zorn à la Columbia university. Excellente dans le genre, on est dans l'esprit zornien de la composer serie. "A season in hell", pièce électronique avec Ikue Mori au laptop et Zorn lui même au sampler (assez étonnant), noisy et cathartique, je ne suis pas super client de l'esprit de Mori et trouve cette composition un peu plate. "Illuminations" renferme une pièce également enregistré en décembre 2011 au Miller theater, avec un trio virtuose qui officie dans le jazz à la base feutré par la composition, mais qui dérive de manière surprenante dans un feeling plus sauvage. Trevor Dunn y est monstrueux à la basse, Kenny Wollesen ferait presque la nique à Joey Baron à la batterie, et Stephen Gossling s'adapte parfaitement au piano. Mais evidemment, on retiendra surtout la dernière pièce improbable du disque, "conneries", ou Zorn y joue tous les instruments (sax, piano, orgue, guitare, batterie), alternant passages bruitistes, plages ambiantes oppressantes, accalmies latentes et schizophrénie musicale. Pour l'accompagner, Mathieu Amalric, acteur/réalisateur assez connu pour nous les français, mais que les étrangers découvriront avec surprise : il récite ici un extrait de "l'album Zutique" de Rimbaud avec une verve et une gouache inspirée qui fait plaisir à entendre, tels un acteur de théâtre d'époque, complètement immergée dans le tourbillon de Zorn et vivant son texte comme Rimbaud aurait pu le faire. Une vrai bonne surprise.
 
Une oeuvre singulière et unique, mais tout à fait dans l'esprit Zornienne, un hommage dont son auteur peut être fier, et que lui seul pourrait conjurer comme le dit avec humour la tranche Tzadik. Pour fêter sa 100eme référence, la série des archives ne pouvait espérer mieux...

JOHN ZORN - A dreamers christmas


93eme référence de la section Archival series, qui classifie tous les travaux de John Zorn, de ses début en 1973 jusqu'à aujourd'hui. Packaging new era de Tzadik, avec toujours une trés forte implication de Heung Heung Chin au design, comme elle l'avait fait sur "O'o" par exemple. Artwork original pour le cd, et version deluxe pour le LP avec un picture disc trés classe (qui a du être un cauchemar à fabriquer en usine), et même pour le coup le premier 7" du label Tzadik avec deux titres repris de l'album, je possède toutes les versions.
 
J'ai un an de retard sur la kronik de ce disque, mais on est de nouveau dans la période de Noël, ce qui tombe à pic. John Zorn n'est pas un très grand fan de la période fin décembre (il déclarait à Alex Dulith que cette période était creuse pour lui, tout ses musiciens passant les fêtes avec leurs familles), mais il aime apparemment les chants traditionnels de Santa, la preuve avec cet oeuvre singulière et unique dans sa discographie. C'est certainement après son masada marathon à l'opéra de NY en 2011 (j'y étais, un report est en ligne), et profitant de la présence de Mike Patton à Manhattan, pour aller enregistrer avec sept de ses camarades les plus proches quelques chansons traditionnelles de noël. Sept reprises plus ou moins connus, et deux compositions originales signé Zorn, dans le pur esprit easy listening de The dreamers. Aucun faux pas dans le jeu magnifique de sextet, la cohésion s'est d'autant plus formé que le groupe enregistrait ici son 4eme disque ensemble. Mike Patton clôture le disque en croonant comme un fanfaron et sur un "merry christmas everybody !" sympathique. Difficile d'être déçus par cette vision de Zorn, je suis personnellement conquis par l'oeuvre qu'on écoutera avec plaisir chaque mois de décembre...

mardi 11 décembre 2012

MASADA - Live in Middelheim (1999)


Même si j'aime beaucoup Masada, je dois avouer que j'aurais mis un moment à me procurer toute la série de disques live qui encadre le groupe : en posséder un ou deux me suffisait amplement, car Masada, pour avoir vu la formation plusieurs fois en concert, ne donne jamais de mauvais concerts. Mais force de constater aussi que les lives de Tzadik sont tous unique en soit, de par leurs set-list, leurs productions, et leurs lieux qui ont plus ou moins d'importance dans l'histoire du quatuor. Profitant d'un énième voyage à NY, je me suis donc procuré les volumes qui me manquait dans cette collec'. Aprés une petite présentation assez marrante, place à ce concert impressionnant de Masada dans un festival et enregistré par la radio belge. La fameuse tranche Tzadik insiste aussi sur le fait que les membres n'avaient pas joué ensemble depuis plus de 6 mois, et repartaient chacun de leur coté juste aprés cette date : le résultat n'en est que plus ahurissant. Sauvagerie, improvisation, télépathie et onze classiques du premier masada songbook balancé à bout portant. Un grand moment de jazz...