La section Archival series est, comme son nom l'indique, une sous division de Tzadik crée à l'époque pour rééditer tous les travaux de Zorn diffcile à trouver dans leur première édition (aujourd'hui, Zorn y publie l'intégralité de son oeuvre, et pas seulement des archives). Le filmworks VIII regroupe deux oeuvres qui ont toutes les deux vue le jour en 1997, d'ou l'appellation simple de "1997" sur la couverture jaune.
"The port of last resort" est un documentaire sur la fuite des réfugiés juifs à Shanghaï pour échapper à l'Allemagne nazi dans les années 30. Une part de l'histoire et du martyr des juifs assez méconnu, résumé avec des images d'archives en noir et blanc dans un documentaire qui demeure toujours aujourd'hui largement disponible. Zorn fut contacté à la fin de l'année 1997 et mit au point l'idée de travailler avec Min Xiao-fen, joueuse émérite de Pipa (instrument traditionel chinois) rencontré quelques mois plus tôt (la connexion avec Shanghaï étant évidente). Le croisement entre la culture asiatique et juive proposé dans cette bande son et la rapidité d'enregistrement du cercle Zornien ne fut pas chose évidente pour elle, mais elle s'adapta avec brio et propose une fraicheur indéniable sur ce documentaire.
Le Masada string trio agrémenté d'Anthony Coleman au piano et de Marc Ribot à la guitare compléte l'équipe, dont Zorn couvre toujours autant d'éloge, confirmant leurs mérites à atteindre un but commun, et la manière quasi télépathique dont le final est rendu pour des musiciens de haute volée. Sur les 11 titres, deux furent répétés avec William Winant lors d'une répétition au japon, quatre sont extrait du premier Masada songbook. Les trois meilleurs morceaux (dont un "Ruan" décliné en trois versions différentes pour guitare, piano et pipa, de loin le plus beau titre du disque) ont quand à eux été écrit spécialement pour le documentaire : innaproprié de convoquer le Masada original, c'est grâce aux origines asiatiques du sujet que John Zorn eut l'idée de mettre en place une nouvelle formation. Au final, cette bande son s'avère un disque a part entière, aussi bien dans la longueur que dans la beauté, c'est une oeuvre importante des Filmworks...
La seconde partie de ce Filmworks contient dix titres pour un exotique porno gay intitulé "Latin boys go to hell". Pour avoir vu la bande annonce du film, je ne sais pas si on peut parler vraiment de porno, mais plutôt de cinéma gay, car le film semble avoir une vraie histoire et intrigue, sur fond de fond de relation homo hispanique. Le nom du compositeur New Yorkais ne sera de toute façon pas associé au film, explication : Aprés avoir vu le film, Zorn refusa au premier abord de s'en occuper, il ne sentait pas qualifié pour en faire la bande son, et disa à la réalisatrice Ela Troyano (une amie de trés longue date) qu'elle ferait mieux de contacter Marc Ribot qui était dans sa période trés latine avec son projet cubain Postizos. Devant l'insistance de Ela, le compositeur réfléchit à la possibilité de créer une soundtrack tout en percussion, idée qui fut vite réfoulé, la réalisatrice pensant associer Ribot à Zorn. Ce dernier, véxé, l'envois chier...
Un mois plus tard, Zorn vient au nouvelles, et se rend compte que la réalisatrice n'a contacté personne d'autre et demeure au point mort. Il re-propose ses services à condition qu'il puisse lui fournir le résultat final sans être dérangé. Le final sera une catastrophe, non seulement Ela Troyano n'utilisa pas le bande son de Zorn, mais mettra en sus du rock assez ringard et du disco générique. John Zorn demanda à ce que son nom ne figure pas au générique et déclara que c'était l'une des relations de boulot les plus foireuses qu'il eut pour une bande son de film. Certes, la vision Zornienne était trop avant gardiste à priori : une bande son avec uniquement Cyro Baptista aux percus et Kenny Wollesen au marimba. Brillante dans le genre, ambiancé comme il se doit, mais peut être un peu limité pour un film à l'intrigue dramatico-amoureuse sur fond de jeunes bronzés, musclés et gay.
Un volume VIII qui compte surtout pour la brillante bande son du documentaire, une des plus belles qu'il ait composé selon Zorn lui même. Oeuvre singulière qui offre une brillante exposition au Masada string trio, qu'on retrouvera assez vite sur d'autres filmworks...
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