samedi 23 novembre 2013

DAVID GOULD - Feast of the passover

Après un excellent premier disque datant de 2001 "Adonai in dub", voici le retour en grande pompe de David Gould, soit quasiment l'unique compositeur de reggae du label Tzadik (hormis quelques dérives de Jamie Saft parfois). Fête de la Pâque juive, le Séder est composé de 15 étapes durant lesquelles les participants chantent des psaumes et récitent des louanges à Dieu. Les Juifs se remémorent à cette occasion le passage de leur condition d'esclaves à celle d'hommes libres. Ce passage est aussi le symbole de celui de l'ange de la mort planant au-dessus des maisons des enfants d'Israël (soit le passage de la mort à la vie), de la traversée de la Mer Rouge par le peuple hébreux, de la constitution d'Israël en une nation, du solstice de printemps, etc. Gould a réarrangé ces chants avec le style reggae-klezmer qui le caractérise et les a enregistrés à Boston, Ithaca et en Jamaïque en compagnie d'un all-stars groupe comprenant entre autres des membres des Silvertones et des Ethiopians. Connexion parfaite entre la tradition juive et l'esprit Rasta, "Feast of the passover" est un superbe opus planant et trippant, parfait pour faire le dopesmoker et chiller en balochant la tête au rythme de grosse vibration reggae-roots...

PETER GARLAND - Three strange angels

Peter Garland est un traveller, on s'en rend compte clairement en lisant sa biographie : il n'a jamais cessé de voyager entre 1973 et 2005, visitant des dizaines de pays, s'imprégnant sans cesse de multiples cultures, rencontrant de multiples personnes au grés de ses périples (il était proche entre autre de John Cage, Harry Partch, ou Colon Nancarrow). Si la Californie est son pays d'adoption (c'est l'endroit ou on était enregistré toutes les pièces du disque), il est tombé amoureux du Mexique plus particulièrement, s'y installant à plusieurs reprises, puisant ainsi son inspiration dans la musique amérindienne et la musique rituelle mexicaine. Après des dizaines d'années de voyages, il vit aujourd'hui une retraite paisible dans le Maine. Compositeur parmi les plus méconnus de la seconde génération des minimalistes de la West coast, il a cependant toujours eu le soutien indéfectible d'une personne qui adore sa musique : John Zorn. Après deux disques sur Avant, le label japonais pour qui Zorn fût le directeur artistique entre 1992 et 1995, Peter Garland a naturellement bifurqué sur Tzadik afin de sortir la suite de ces travaux. Dernier disque en date de 2008, "Three strange angels" est en fait la réédition de son tout premier disque intitulé "Border music" paru en 1992 sur le label What next ?. Une nouvelle pochette voit le jour est reflète bien l'esprit du disque : exotique et envoûtant. Des compositions datant de 1972 à 1992, ainsi que 30 minutes inédites d'un concert datant de 1989. Pour faire assez simple dans la description, l'œuvre oscille entre deux instruments principaux : la Harpe (dont certains titres sont tout simplement magnifiques "Cantares de la frontera") et les percussions (toujours sous l'influence de ces voyages). Une excellente réédition à découvrir, parfaite si on est d'humeur aventureuse sans vouloir bouger de chez soi...

dimanche 17 novembre 2013

BUN CHING LAM - The child god

Sortis en 1998, "The child god" est le second disque de Bun Ching Lam pour Tzadik, et pour le coup son dernier (elle reste pour le coup active dans la musique et a sortis quelques disques après son incursion pour le label new yorkais). On n'est pas très étonné d'entendre ce genre de volume parmi les balbutiements d'identité du label : John Zorn est encore pas mal imprégné de son va-et-vient entre NY et le Japon, il signera pas mal d'artistes asiatiques ou ayant des origines à la création de ce dernier. Née à Macao mais ayant grandis aux USA, la compositrice nous offre une œuvre singulière et aboutie pour le coup, soit une mise en scène musicale de "The creation of the gods", une nouvelle mystique de la dynastie Ming sur la notion de "l'enfant -dieu". Une rencontre organisé entre des musiciens chinois pour les instruments asiatiques (Pipa, Zheng, Xun) et des performers de NY, au violon, clarinette basse, et percussions. Une musique classique aventureuse et asiatique sur lequel une narration parlée par un récitant s'alterne avec un chant fait par un soprano. J'ai bien accroché musicalement sur certains passages, mais je suis resté complètement hermétique à l'histoire et son chant plaintif qui l'accompagne, malheureusement présent sur tous le disque. Reste une rencontre entre l'art musicale du grand ouest et la tradition des troubadours chinois qui reste intéressante si on est d'humeur. Je m'attendais à mieux avec ce concept et reste un peu déçus du rendu final

BARBEZ - Bella ciao

Dan Kaufman, déjà auteur d'un excellent volume sur la radical jewish culture ("Force of light, chronique disponible dans la section) revient en 2013 avec un nouveau disque, cette fois çi plus vraiment en solo puisque c'est son groupe Barbez qui nous offre "Bella ciao" dans sa composition (on retrouvait déjà tous les membres sur le précédent). C'est en été 2009 qu'ait venus l'idée de ce disque lors d'un voyage à Rome, notamment après être passé dans une petite rue romaine qui portait les stigmates d'un attentat des partisans italiens contre un troupe de soldat nazis (dont 33 trouvèrent la mort) le 23 novembre 1944. Tous les détails de l'histoire sont dans le livret du disque, les représailles qui suivirent, les détails historiques, les inspirations, etc...Malgré que les juifs roumains ont été particulièrement marqué par l'holocauste, leur identité est restée bien distincte des différentes cultures juives séfarades et ashkénazes, c'est l'inspiration principale pour les mélodies et compositions du disque. Plusieurs poèmes de deux auteurs italiens (Paolo Pasolini et Alfonso Gatto) ont aussi été insérés dans la musique et récités sur quelques titres par des récitantes n'officiant pas dans Barbez. La cohésion, la sensibilité et l'inspiration du combo de Kaufman fait mouche sur les 11 titres présents, avec une atmosphère plus sombre et négative qu'à l'accoutumée dans la musique traditionnelle juive, mais avec toujours cette lueur d'espoir qui en font un sympathique volume de la série...

mardi 5 novembre 2013

JON RASKIN & CARLA HARRYMAN - Open box

Carla Harryman est une poète, essayiste et auteur née à Orange en Californie. Elle enseigne l'écriture créative à l'université du Michigan. Jon Raskin est un des membres du Rova saxophone quartet, basé principalement à San Francisco. C'est à la lecture des poèmes de Carla que le saxophoniste eu l'idée de les mettre en musique. On n'en sait pas vraiment plus sur la rencontre et la conception du disque, hormis que le processus a duré plus de trois ans. Une jolie pochette arty qui peut plaire aux filles et qui renvois à un certain coté poésie, et sept titres développés. Le premier "Fish speech" détonne : pur titre de noise avec une grosse basse ronflante, et un riff acide et rentre dedans, on se dit que la rencontre va péter des flammes. Il s'agit hélas de la seule bonne incursion musicale, le reste naviguant entre improvisation redondante, noise inutile, et expérimental épuisant. Il reste ensuite l'interaction entre les deux protagonistes qui récitent donc des poèmes de Harryman tout au long du disque (enfin, quasiment, car "la reactive meme" ne s'encombre même pas de paroles puisque des onomatopées sont gloussés tout du long, le résultat n'est pas terrible, n'est pas Patton qui veut). La barrière de la langue met un frein a un éventuel engouement sur les lyrics, mais bon, les anglais s'y retrouveront peut être. Au final, une rencontre médiocre. Après le "Someck and Sharp" raté sur la radical jewish, on se rend compte en fait que poésie et musique ne font peut être pas bon ménage...

lundi 4 novembre 2013

DAVID ROSENBOOM - Life field

A l’instar de deux de ses compagnons, James Tenney et Richard Teitelbaum, David Rosenboom est un vétéran de l'avant-garde américaine depuis plus d'un demi-siècle. Il fut de toutes les grandes aventures, celle de l'Electric Circus en 1969 comme celle du Theatre of Eternal Music de La Monte Young. Il figurait sur la première version du In C de Terry Riley à la fin des années 60, sur le premier album de Jon Hassell (Vernal Equinox), comme sur le Five Compositions d'Anthony Braxton. Parfaite introduction à l'œuvre de ce compositeur prolixe, "Life Field" rassemble une sélection de travaux couvrant des champs sonores aussi divers que le minimalisme, l'outil électronique, les modes de jeux aléatoires, la relation improvisation-composition, le bio-feedback (un processus d'amplification des ondes électriques du
cerveau pilotant des synthétiseurs). Couvrant les périodes très larges de 1964 à 2004, cet rétrospective est une aubaine pour découvrir la vision hautement expérimentale du compositeur, le livret contenant beaucoup de notes et photos pour plus d'informations sur les différents processus.

samedi 2 novembre 2013

DAVID FULMER - On night

Ancien élève de Milton Babbitt, titulaire d'un doctorat à la Juilliard school, il intègre l'université de Columbia en 2009 et se fait remarqué mondialement lors de ses "violin concerto" au Lincoln center de NY en 2010. On a pu également le voir apparaître sur les deux derniers disques classiques de John Zorn sur la composer serie, et l'apercevoir lors des récents concerts que ce dernier a donné pour ses 60 ans lors des introductions de musique de chambre.
C'est un superbe artwork qui ponctue sa première œuvre pour Tzadik, certainement parus sous l'impulsion de ce diable de Zorn, chaleureusement remercié au sein du disque. "On night" est une pièce composé entre 2010 et 2012, principalement conçus pour un soprano saxophone en leader, accompagné de son ensemble de sept musiciens, et intégralement conduite par David Fulmer qui paradoxalement ne joue pas sur le disque donc. Entièrement en allemand, les cinq plages sont découpés selon les différentes trames sonores et assemblées pour ne former qu'un unique long titre typique de la chamber music de la composer serie. Tantôt dramatique, tantôt apaisante, les multiples moments ou l'ensemble se met en branle sont des grands moment de classique virulent dans le genre. Puis le saxo reprend sa tirade, comme pour nous raconter une histoire, en décalage de l'ensemble qui reste parfois muet. David Fulmer nous offre une très bonne première œuvre dans le même genre que Zorn dans cette même série, avec une atmosphère sombre et délicate en même temps. On attend la suite sans soucis...

NOAH CRESHEVSKY - The four seasons

Directeur d'un centre musical basé sur l'électronique, professeur au Brooklyn college, à l'image de l'art work du disque, Noah Creshevsky est un compositeur incontournable de NY. Cet élève de NADIA BOULANGER et LUCIANO BERIO est depuis 1971 une éminence de la composition électroacoustique. Son approche ressemble à celle de Luc Ferrari, Scott Johnson ou Mark de gli Antoni que vous avez pu croiser sur ce blog : les éléments electro-acoustiques, les charcutages des bandes magnétiques et le dépiotage de la musique sous toutes ces formes. Aprés quelques disques sortis en indé, et un deux disques sortis sur Tzadik auparavant, retour du compositeur avec "The four seasons" à l'artwork arty une nouvelle fois. D'une palette large incorporant dialogues et “chutes bruitistes”, il décompose ses œuvres (instrumentales ou chantées) pour les réassembler en de singuliers agrégats sonores. Voix et électronique subtile se retrouvent magnifiées par autant d'effets de loupe générant une sorte d'hyperréalisme sonore. Ses “quatre saisons” (il fallait l'oser) posent les jalons d'une œuvre initiée en 1992. On ne voit honnêtement pas trop la différence entre les saisons, l'ensemble du disque forme une nouvelle fois une histoire folle et cartoonesque, avec son lot de sonorités improbables, et un ensemble globale qui s'écoute d'une traite. On est pour le coup dans de la musique fondamentalement avant gardiste : peu de gens ont entendus cet assemblage sonore, c'est absolument certain. Peut être est ce l'avenir de la musique ? En attendant, Noah Creshevsky est un grand compositeur avec une vision aussi folle que géniale. Cette belle œuvre vous l'attestera une nouvelle fois