samedi 21 juillet 2012

JOHN ZORN - Mount analogue


94eme référence de la section Archival series, qui classifie tous les travaux de John Zorn, de ses début en 1973 jusqu'à aujourd'hui. Énorme packaging pour la sortie de ce disque, un poil plus cher qu'à l'accoutumée d'ailleurs. Relié dans une couverture paraissant vieillis, symbole gravé à l'arrière, peinture de Remedios Varo sur la pochette, représentant la fameuse ascension du "Mont analogue", et un brillant hommage à Georges Ivanovitch Gurdjieff.

Avec « Mount Analogue », le nouvel opus de sa prolifique discographie, John Zorn est allé puiser son inspiration dans la vie et l’œuvre du philosophe mystique Georges Ivanovitch Gurdjieff. D’autres ont repris ses compositions orchestrales ou, comme Keith Jarrett, leurs transcriptions pour piano réalisées par de Hartmann. Zorn a préféré composer une suite de près de 40 minutes prenant la forme d’un voyage initiatique glissant avec fluidité d’un paysage à l’autre comme au détour d’un col de montagne ou d’un tunnel reliant des vallées enchantées. Un film sonore…
La composition ressort de sa série des file cards : une série de fiches minutieusement préparées qu’il s’agit ensuite d’agencer dans le bon ordre et dans la fièvre du studio… La direction d’orchestre y est donc aussi importante que la composition. La formation choisie par Zorn est le quartet Banquet of the Spirits de Cyro Baptista, augmenté du vibraphone de Kenny Wollesen. Dans le livret de l’album, John Zorn confie avoir découvert Gurdjieff à 15 ans à la lecture de « Rencontres avec des hommes remarquables » alors qu’il fréquentait la librairie Weiser au bas de Broadway. D’autres œuvres mystiques allaient suivre, de Gurdjieff ou de ses disciples, toutes marquantes pour l’adolescent : c’est aussi par cette librairie qu’il découvrit In Search of the Miraculous ou Crowley qui allait également inspirer plusieurs de ses œuvres mystiques de ces dernières années. Mais sans jamais adhérer à l’un de ces groupes philosophiques, Zorn considère qu’il y a puisé une philosophie et une exigence qui constituent son axe de vie d’artiste et de créateur. Mais le surréalisme et Dada le fascinaient tout autant (Zorn évoque sa rencontre avec Salvador Dali en 1969 !) et c’est l’œuvre de René Daumal qui a concilié les deux mondes. Et notamment éclairé par ses dessins sa vision du Mount Analogue, cette île invisible reliant le Paradis et la Terre vers laquelle vogue le navire « Impossible »…
Zorn a passé trois semaines à écrire l’ensemble des 61 séquences, entouré des livres de Gurdjieff et se repassant en boucle le film que Peter Brook a consacré aux Rencontres avec des hommes remarquables. À sa grande surprise, le compositeur constata que l’ordre d’écriture des séquences s’imposait miraculeusement comme une évidence et qu’il s’agissait bel et bien d’une Suite. Restait à l’enregistrer : 3 journées marathon du 13 au 15 juin 2011, les musiciens travaillant entre 12 et 16 heures par jour, finissant même à 5 heures du matin en une occasion, John Zorn ne s’octroyant que 2 heures de sommeil entre temps et ne mangeant quasiment rien… Après coup, Zorn s’est aperçu que la pleine lune tombait pile ces jours-là, avec même une éclipse totale le dernier jour ! Trois passages furent supprimés en studio, le tout début et la toute fin de l’œuvre durent être retravaillées, mais l’essentiel de l’enregistrement s’appuie scrupuleusement sur la composition dont les fragments enregistrés l’un après l’autre s’emboîtent comme un puzzle dont la cohérence saute aux yeux en bout de course.

Extrait de la chronique d'Alex Dulith, zornologue convaincus, dont je n'aurais pas dit mieux sur le processus de création de ce chapitre Zornien. Reste mon modeste avis : une oeuvre captivante de bout en bout, et un nouvel édifice de renom dans la carrière du maître new yorkais. L'utilisation du banquet of the spirits apporte une authentique nouvelle coloration dans les sonorités exotiques, et satisfait mon envie de voir John Zorn utilisé des nouveaux collaborateurs au lieu de son cercle habituel. Un opus incontournable est a vu le jour en 2012...

4 commentaires:

  1. Pour l'optique "Gurdjieffienne" de la musique:
    http://lekhyroscope.blogspot.ca/2012/04/john-zorn-mount-analogue-tzadik-2012.html

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  2. on s'en fout, gurdjieff était un vil gourou (voir le témoignage de revel) et sa musique une belle rigolade. par contre ce disque de zorn est génial et c'est surtout ça qui importe.

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  3. merci pour le lien vers Alex Dulith

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  4. @Nemo
    J'ai aussi rigolé en écoutant le Zorn (comme pour les petites clochettes dans le dreamers christmas) mais c'est vrai il est génial.

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