dimanche 19 décembre 2021

RADAR - Easy listening

 

Trois jeunes musiciens de la zone de Kansai qui ont du envoyé leur démo au siège de Tzadik à NY (à mois que ça n'est été une découverte live) pour une sortie mondiale en 2005 sur la serie New japan. Pochette mystère pour une musique qui ne l'est pas moins, du moins dans sa forme : trio piano-basse-saxo soprano ! Evidemment, on est dans l'expérimental pur souche : pas vraiment jazz, mais avec quelques relents étant donné les instruments, les titres passent et ne sont pas désagréable même si on ne retient guère grand chose au final. Une musique expérimentale avec parfois un chant parlé en japonais dont on ne comprend malheureusement pas les paroles. Le titre de l'album est complètement trompeur donc, car on est trés loin de l'easy listening pour le coup. La tranche Tzadik s'emballe clairement pourtant : Honnête, imaginative, belle, bizarre, méditative, hilarante, pensive, courageuse, nostalgique. Au moins, ça leur a plu ! mais difficile à croire que ce disque ait été un best seller. Pour couronner le tout, il s'agit du seul disque du groupe qui a disparu de la circulation par la suite. Un chapitre anecdotique du label, ça arrive parfois... 

mardi 14 décembre 2021

YOSHIDA TATSUYA / SATOKO FUJII - Erans

L'unique album de Satoko Fujii sur Tzadik est vraiment une petite perle pour les amateurs de Piano et de jazz tout azimuth. Yoshida Tatsuya, c'est le vieux briscard du label, qui apparaît sur pas moins de six disques de la New japan, dans diverses formations des Ruins, puis de multiples apparitions un peu partout, on peut penser que lui et John Zorn s’apprécie bien, il a d'ailleurs fait de l'interim au sein de Painkiller. Ce n'est pas la première rencontre entre le batteur génial et tentaculaire et la pianiste virtuose : un premier disque du duo avait été enregistré en live le 18 mai 2002 au festival international de musique actuelle de Victoriaville, un festival ou Zorn a régulièrement l'habitude de se rendre en tant que performeur ou en simple spectateur ; Nul doute qu'il fut soufflé par la prestation des deux protagonistes ce soir la, et il proposa dans la foulée d'enregistrer un disque studio dés qu'ils pouvaient. Chose faite le 12 juillet 2003 dans un studio de Brooklyn, en one shot durant une journée (on appréciera, toujours hallucinant) pour un total de 13 titres et une heure de musique. Au programme, de l'improvisation Piano/Batterie évidemment qui tape dans différents tempo : du jazz posé et tranquille au free le plus sauvage ou on part dans tous les sens. Énorme niveau technique, et on se laisse facilement transporter par la virtuosité des musiciens. Chouette artwork qui fait le pont avec Ruins, et chapitre cohérent de la New japan...
 

dimanche 5 décembre 2021

KOREKYOJIN - Korekyojin

Korekyojin = les deux membres de Ruins avec le guitariste Kido Natsuki, un tueur de la six cordes, et il n'en fallait pas moins pour s'associer avec le duo tokyoite complètement malade. J'avais déja chroniqué leur second disque pour Tzadik il y a 6 ans et qui était sortis en 2005 et qui était un live. Mais ils avaient fait leur première incursion sur Tzadik en 1999 pour leur tout premier disque, John Zorn ayant certainement leur pousser au cul pour que le projet se fasse (il est spécialiste pour ça). Ils ont depuis roulé leurs bosses car ils ont sortis neuf autres disques (dont le dernier en 2021), tous sur le label de Yoshida Tatsuya, le batteur et patron des Ruins, les deux disques Tzadik sont l'exception. A part ça, on est evidemment toujours dans la grande tradition du free-rock sauvage mais pas que. Un titre comme "Out of head" nous prouve que le trio sait être groovy/funky si il le souhaite. Vu l'énorme niveau technique des trois musiciens, il est vraiment sur que ces gars peuvent tous jouer. Le tourbillon sonique se met rapidement en marche, et c'est juste épatant à entendre. La présence guitaristique est vraiment le petit supplément d'âme en plus qui rend encore plus la musque du trio convaincante, car il peut y avoir parfois un petit manque de variété au sein des disques de Ruins (forcément limité par le coté duo). Un trés bon chapitre de la New japan, un point de départ crucial pour Korekyojin puisque ils ont continué après toutes ces années et une belle réussite en matière de musique "hors norme".

dimanche 14 novembre 2021

MERZBOW - 1930

 

Une évidence incroyable que l'association de Merzbow, le maître ultime de la noise extrême japonaise et du label expérimental new yorkais pour sa section japonaise. Il est encore plus incroyable de dire un mot sur ce "1930" sortis en 1998, et de savoir que Masami Akita continue inlassablement de sortir des disques années après années (discogs en ai pour l'instant à 536 enregistrements !) avec une régularité qui force l'admiration. J'aime le concept de Merzbow mais je suis comme l'auditeur moyen je pense : un petit peu à dose épisodique, j'en possède une vingtaine de disque et basta, on s'arrête la. Existe t'il sur cette terre une personne qui possède toute la discographie de Merzbow ? et qui donc en écoute tous les jours de l'année ? j'ai un doute la dessus mais j'en ressortirai épaté dans tous les cas. Il n'est nul besoin avec Merzbow de peser, d'intellectualiser, de conceptualiser la musique. L'expérience sonore doit se suffire à elle-même. Ici, on retrouve ce qui caractérise très souvent l'art de Masami Akita : accumulation de samples débités à toute vitesse, distorsion extrême des sons, fréquences hyper saturées et agressives, maintien sur presque toute la longueur du disque d'un même niveau d'intensité sonore très élevé... C'est-à-dire tout ce qui fait sa force (au niveau de l'impact physique du son, qui saisit et violente constamment l'auditeur, créant également un effet de transe), mais aussi, nécessairement, sa faiblesse (au niveau du manque de variation du volume sonore ainsi que de la texture d'ensemble, qui pousse à la saturation). 1930 est tout de même un bon cru : la gamme de sons et d'effets utilisés est variée, il a d'énormes montées d'adrénalines par moments, et l'on est rapidement entraîné dans l'ouragan, dans le déferlement bruitiste. C'est un furieux télescopage de bruits blancs, fracas de verre et de métal, assauts d'ondes courtes, qui vous mettra le cerveau en purée. Le titre de l'oeuvre fait sans doute référence à la grande crise économique qui frappa l'occident industrialisé durant cette décennie - et l'on peut donc voir dans cette heure de musique une métaphore de l'homme civilisé broyé par les machines qu'il s'est construit (mais en fait on s'en fout). Le meilleur de l'expérience arrive au dernier mouvement, là où précisément le Japonais ménage davantage ses effets, utilise des nuances, théâtralise sa composition - ce qui ne lui donne que plus de force.

Un petite anecdote finale : il pourrait y avoir de l'eau dans le gaz entre le compositeur et le label, car le disque est officiellement sold out via le site de Tzadik, or le label a toujours réédité tous ses enregistrements. Il est désormais un peu plus compliqué de se procurer 1930, mais il est encore assez facilement trouvable sur le marche de l'occaz...

YAMAMOTO SEIICHI - Nu frequency

Yamamoto Seiichi est une légende de la scène rock/noise d'Osaka. Il est une figure centrale de la scène underground japonaise, que ce soit en tant que créateur du label Ummo records, en tant que fondateur du club rock Bears en 1988 (renommé aujourd’hui Namba-bears et toujours en activité !) et surtout guitariste dans les groupes Omoide Hatoba, Rovo (dont on retrouve aussi une trace sur Tzadik) et surtout les mythiques Boredoms
John Zorn ayant traîné ses guêtres au Japon durant plusieurs mois dans les 80's, il a en toute logique rencontré tout les activistes de l'époque, et il a ressortis son calepin d'adresse au moment de signer divers artistes de la serie New japan, dédié au pays du soleil levant. Premier disque du guitariste sortis en 2003, relativement plus intéressant que celui chroniqué ci dessous. Yamamoto n'y joue pas uniquement de la guitare puisque il s'occupe aussi de la basse, synthetiseur, batterie et percussions, tandis qu'une copine à lui fait quelques percussions sur 3 titres. L'ensemble sonne comme du easy listening expérimental super bizarre, extrêmement difficile à décrire. Il y aussi de la dissonance, des sifflements stridents poussé à l’extrême, des passages ambiants un peu sombre. En total contraste avec un titre comme "No side" et son atmosphère exotica presque groovy. "Nu frequency" l'album porte bien son nom et c'est vraiment sympa de découvrir ses sonorités bien différentes de la masse populaire...  

lundi 8 novembre 2021

YAMAMOTO SEIICHI - Baptism

 

Yamamoto Seiichi est une légende de la scène rock/noise d'Osaka. Il est une figure centrale de la musique Underground japonaise, que ce soit en tant que créateur du label Ummo records, en tant que fondateur du club rock Bears en 1988 (renommé depuis Namba-bears, et toujours en activité !) et surtout guitariste dans les groupes Omoide Hatoba, Rovo et surtout les mythiques Boredoms. 

John Zorn ayant traîné ses guêtres au Japon durant plusieurs mois dans les 80's, il a en toute logique rencontré tous les activistes de l'époque, et il a ressortis son calepin d'adresse au moment de signer divers artistes de la serie New Japan, dédié au pays du soleil levant. Second disque de Seiichi sortis en 2008 pour le label New yorkais, on est en toute simplicité sur un disque de guitare solo pur et dur, mais avec un maximum de dissonance comme on peut s'en douter. La comparaison qui revient immédiatement, ce sont les deux influences de Yamamoto, à savoir les anglais Derek Bailey et Fred Frith. Leur approche de la guitare solo est assez identique et reconnaissable, assez dissonant et énigmatique, mais en revanche totalement improvisé. Une vrai performance du coup, expérimentale à souhait cela va de soi...

samedi 2 octobre 2021

PAMELIA KURSTIN - Thinking out loud

 Le theremin détient un pouvoir de séduction lié à sa conception même. Il fut créé au début des années 20 par Léon Theremin (il perfectionnait en fait une invention de Lee De Forest datant de 1915), soit à une époque où le cinéma était encore en noir et blanc, et pas encore tout à fait parlant. A cette époque antédiluvienne Robert Moog lui-même (qui en reprendra la fabrication dans les années 60) n'était pas encore né. Le theremin a littéralement une aura mystique, son fonctionnement étant basé sur les ondes magnétiques, ne nécessitant pas de contact direct, mais une maîtrise du mouvement de ses mains comme on caresse l'invisible, comme on effleure une vague de chaleur au-dessus d'un feu. Et pour couronner le tout, le son produit est étrangement proche de celui d'une voix humaine, dont le timbre évoluerait dans des aigus surnaturels. L'un des seuls instrumentistes à s'être illustré sur cet instrument peu conventionnel fut Clara Rockmore (violoniste de formation). Cette virtuose est vite devenue mythique, mythe tenant au fait qu'il n'existe que de rares documents sonores de ses prestations (du fait sans doute de la difficulté d'enregistrer et de restituer correctement les sons produits par un tel appareil). Le theremin sera ensuite beaucoup utilisé dans des films de science-fiction de série B. Il est également célèbre pour l'usage qu'en ont fait les Beach Boys sur "Good Vibrations". Ces enregistrements épars, utilisant essentiellement le caractère futuristico-exotique de l'instrument, achèveront d'installer la légende. Aussi, avec Thinking Out Loud de Pamelia Kurstin, un album publié par Tzadik entièrement dévolu à ce fameux theremin, on ne peut qu'être conquis d'avance. Le titre de l'album (Penser tout haut) s'appuie sur cet aspect toujours singulièrement mystérieux, un instrument que l'on ne touche pas, mais auquel on transmet ses pensées musicales, comme par télépathie. Avec Thinking Out Loud Pamelia Kurstin relève haut la main (forcément) le défi de nous enchanter en restituant les sonorités féeriques attendues tout en y apportant sa touche (pardon, son effleurement) personnelle. Le premier titre "London" joue totalement, et magnifiquement, sur ce registre de voix humaine aigue. Si Pamelia Kurstin s'était contentée de ce registre, Thinking Out Loud aurait tenu ses promesses enchanteresses, mais serait sans doute tombé dans l'admiration béate et finalement rébarbative. Mais Pamelia Kurstin ne souhaite aucunement être un phénomène de foire, encore moins la réincarnation de Clara Rockmore. Nulle "reconstitution historique" ici, Pamelia Kurstin exploite les multiples possibilités de l'engin et les étend grâce aux technologies actuelles, notamment à l'utilisation de pédales d'effets, de boucles et l'adjonction de quelques parties de guitare et de piano. Sur "Eschschloraque" elle entrelace les aigus divins par échantillonnage et mises en boucles, puis dévie peu à peu dans un univers "bruitiste", quelque part entre un solo de guitare Fender et les larsens de "Pendulum Music" de Steve Reich. Plus loin, "Edinburgh" intègre quelques pulsations vibratoires, une sorte d'accompagnement à la basse, pour des circonvolutions synthétiques, puis des boucles grinçantes et des décompositions sonores dignes de l'ère du laptop. La longue pièce finale "Tonic" (plus d'un quart d'heure), enregistré en concert, prouve encore que ce travail ne repose pas sur des artifices de studio, mais bel et bien sur l'improvisation, en jouant en direct avec les différentes possibilités de manipulation. Sur "Tonic" Pamelia Kurstin installe à nouveau un flux musical composé de boucles de notes de theremin, comme extirpées d'un violon, ou d'autres d'une basse électrique, et de drones électroniques. On retrouve là une approche qui évoque les travaux de David Behrman, l'un des pionniers de l'interaction entre musiciens et informatique en temps réel. (Chronique Neosphères)

dimanche 26 septembre 2021

MINAMO - Kuroi kawa - black river

 

Double disque du projet Minamo sur la série Oracles dédié à la vision féminine du monde expérimental musical. Nous sommes en l’occurrence en plein dedans, une vision instrumental et certainement parfois improvisé de l'association de deux instruments : le piano et le violon. Deux musiciennes connus du giron de Tzadik s'y colle : Satoko Fujii, pianiste japonaise de renom, responsable de plusieurs disques sur la new japan serie. Et Carla Kihlstedt, violoniste vivant sur la côte Ouest, membre de plusieurs groupes d'avant-rock (dont le sleepytime gorilla museum et the book of knots entre autres...) et ayant déjà sévit sur la série Oracles. 

Leur association n'est pas exclusive à Tzadik : un premier disque du duo était sortis deux ans auparavant sur Henceforth records et portait le nom de "Minamo". Le nom a donc été gardé pour rappeler cette association et John Zorn s'est engouffré dans la brèche pour demander plus de contenu musical aux deux musiciennes. C'est même la complète jambon beurre qui est offert puisque nous avons le droit à une session studio complète enregistré en Californie, puis un second disque live enregistré en 2008 au festival de jazz de Vancouver. Les deux disques se complète bien, le studio étant un peu plus aventureux que le live car plus de possibilité de s'exprimer (Fuji joue parfois de l'accordéon, etc...). Et l’interaction entre les deux femmes est tout simplement admirable...

dimanche 16 mai 2021

ZAKARYA - Greatest hits

 

Dernier disque en date du quatuor Zakarya, qui remonte déjà à une dizaine d'année, en 2011 donc. Il y a deux pièges à éviter avec ce disque. Premier point, son titre qui peut paraître trompeur, on pourrait croire à un best of de la période Tzadik fort de la présence de quatre disques complet sur la radical jewish culture, il n'en est rien, aucun titre des albums précédents n’apparaît. Second point, étant donné son tracklisting hautement humoristique (une parodie juive de titres très connus, je vous laisse consulter), on aurait pu croire à un recueil de covers en mode accordéon musclé, il n'en ait rien non plus, il s'agit belle et bien de nouvelles compositions. Sinon, retour au fameux klezmer jazz-core, plus rock que jamais puisque je me suis réécouté la disco complète pour la découverte de ce chapitre. J'ai trouvé le disque vraiment super, le groupe était arrivé au summum de son art et de sa formule : une section rythmique solide, des riffs de grattes bien senties, ce fameux accordéon musclé qui se ballade le long des titres et qui demeure le fils conducteur. Gros feeling rock comme je disais, tirant parfois vers le punk, parfois vers plus de lourdeur, mais c'est toujours une vrai réussite. Belle pochette arty made in Tzadik, comme toujours. Hélas, le groupe semble avoir un peu disparu des écrans radars, je n'ai du moins rien trouvé sur la toile...Peut être l'ultime témoignage des strasbourgeois donc, ils peuvent être fier de cette dernière offrande (puis le nom des titres vous feront forcément sourire...)

dimanche 11 avril 2021

KOBY ISRAELITE - Is he listening ?

J'avais été conquis par le premier album de Koby Israelite sortis en grande pompe dans le giron de Tzadik : le multi instrumentiste allait ensuite bénéficier d'une exposition supplémentaire en s'attelant à s'occuper du book of angels de John Zorn et en offrant un volume 4 détonnant. Le second album de 2004 souffrait d'un petit coup de mou et sa réécoute récente ne m'a pas plus marqué que ça. Quid de "Is he listening ?", troisième chapitre de Koby sur Tzadik et sortis en 2009. Je n'aurais mis que 12 ans à le savoir...Il ne faut pas oublier la mise en contexte : Koby Israelite est un muti instrumentiste de Londres, il ne joue pas moins de treize instruments sur ce disque et quelques potes viennent même l'aider avec des instruments plus exotiques ou quand il faut du nombre. Ensuite, le créneau du musicien a toujours été de bousculer les genres et les codes, en cela sa catégorisation de la radical jewish culture est quasi réductrice, tant on assiste à un cocktail musical détonnant. Je pense qu'il s'agit du meilleur disque de Koby de la série. Plus que jamais les fans de Mr Bungle période "california" devraient s'y retrouver car il y a encore plus de gros riffs metal que sur les autres. Riffs qui rencontre évidemment du balkan, du reggae, du klezmer, du jazz, des touches de classique et gypsy, avec une cohésion rare, une alchimie envoûtante, et un sens de l'humour débordant de fantaisie. La production est absolument canon d'ailleurs (il possède son propre studio à Londres) et l'ensemble sonne fort et limpide. Je suis content de terminer sur cette bonne note de la part de Koby Israelite, il n'a sortis qu'un seul album en 2013 puis plus grand chose par la suite et il semble s'être éloigné du label New Yorkais. Il reste cependant un super artiste créatif à découvrir via sa discographie sur Tzadik...   

mardi 23 mars 2021

JAMIE SAFT TRIO - Trouble

Après la création du jamie saft trio en 2005 pour interpréter le premier volume historique du book of angels, les trois musiciens décident de rempiler l'année suivante (sous l'impulsion de Zorn ou de Saft, mystère...) pour un disque intitulé "trouble" mais sous titré plus explicitement "The Jamie Saft trio plays Bob Dylan". Le concept est lâché, la photo de couverture est trés claire : le claviériste barbu est archi fan de Robert Allen Zimmerman, plus connus sous son nom de scène. D'origine juive, la présence du disque au sein de la radical jewish culture est donc pleinement justifié, même si le songwriter se convertira par la suite au christianisme. Saft justifie aussi dans les notes du livret l'existence de "trouble" par le fait que l'on se focalise souvent sur les paroles de Dylan, mais rarement sur la qualité intrinsèque de sa musique qui est pourtant brillante, sachant aussi qu'il savait souvent improviser en concert. Sur les huit titres présents, seulement deux comportent des paroles : Mike Patton se colle à une version tonitruante de la "ballad of a thin man" avec la verve habituelle qu'on lui connait, la ou le chanteur Antony se la joue crooner sur "living the blues". Le reste sera six titres instrumentaux brillants, particulièrement jazzy (peut être seul le dernier titre se distingue par son coté religieux). Greg Cohen est très solide comme à son habitude ; Ben Perowsky ne fait pas trop de bruit au sein de la downtown scene, mais ça reste un excellent batteur au feeling jazz incroyable (on se souvient du live au stone en compagnie de Zorn, Patton, Douglas, etc...). Jamie Saft est quand à lui à l'époque un regular du cercle Zornien : au piano, à l'orgue ou au clavier, il fait des ravages par une technique hors pairs. Je ne connais pas tous les originaux interprétés sur ce disque, ce qui m'a permis une approche trés neutre de ce volume jewish, le verdict tombe assez vite : on a affaire à un magnifique disque de Jazz, qui plaira autant aux initiés qu'aux néophytes de la carrière de Bob Dylan...
 

dimanche 7 février 2021

JERRY HUNT - SongDrapes

 

Jerry Hunt est né en 1943 à Waco, Texas. Jeune musicien talentueux au piano, il fait ses classes avec Jack Ruby, pianiste houleux de strips clubs. Fondateur de sa propre église par correspondance à l'age de treize ans, il devient trés vite un adepte de l’ésotérisme, un fervent des croyances mystiques, des rituels exotiques, de l'approche spirituel des sciences modernes et de la vision d'Aleister Crowley. Aprés l'université, il travaille comme pianiste en 1969 et commence des performances dans des concerts de musique contemporaine. Il devient consultant technique pour des sociétés de productions de films et de vidéos et travaille avec plusieurs directeurs musicaux. A coté de ça, il développe de plus en plus la vision d'un shaman moderne : il commence la construction de ses propres instruments électroniques, et il devient un pionnier de la musique électronique en live, et ceux bien avant l'apparition des samplers commerciaux, des logiciels d’éditions de musiques et des ordinateurs. Il continue de tenter de développer sa vision les années suivantes avec des performances live avec différents artistes comme Karen Finley, Maria Blondeel et le compositeur Joel Ryan. Jerry Hunt restera cependant très confidentiel : seulement deux disques verront le jour en 1979 et 1992. Il meurt fin 1993 d'un cancer, et c'est après sa mort qu'on découvre une partie de sa vision musicale. Tzadik exhume en 1999 les enregistrements nommé "Song drapes", dont une partie seront joué live au Kitchen, un lieu de performance expérimental à NY en 1992 (il y a fort à parier que Zorn était dans l'assistance) avec la récitante Karen Finley que l'on retrouve sur 5 titres du disque. L'atmosphère de cet album est folle : de la musique electro-acoustique bien débridé, certainement joué sur des instruments modifiés ou bien directement sortis des entrailles des "machines" de Jerry Hunt. Les instrumentaux sont absolument envoûtant, la performance de Karen Finley est quand à elle possédée : elle vit son texte à fond. Plusieurs instrumentaux méritait cependant egalement des textes : Zorn a donc envoyé en studio Shelley Hirsch (qui amène un peu plus de musicalité parfois, elle chante plus qu'elle ne parle) sur quatre titres et l'incontournable Mike Patton sur un titre, ou le lascar le transcende, pour devenir une beauté expérimentale. Beau chapitre qui s'inclut à 100 % dans la composer serie, on est clairement dans l'avant garde musicale...

lundi 4 janvier 2021

KEIJI HAINO with BORIS - Black : implication flooding

 

Je continue l'exploration sonique de l'oeuvre de Keiji Haino avec l'écoute de cette collaboration lointaine avec Boris. Dire qu'il s'agit la du tout premier disque long format du trio, on ne peut pas dire qu'ils recherchaient le succès à l'époque (note : le premier disque du moins à leurs yeux, ils avaient sortis leur premier disque "absolutego" deux ans auparavant, mais le considère comme un single, la chanson unique d'ultra sludge durant tout de même 60 minutes !). Quel chaos sonore ! dans l'absolu, on pouvait s'en douter, mais le son est vraiment extrêmement limite la aussi, une prise live avec beaucoup de larsens. Boris joue sur la dissonance tout du long, pas de gros riffs lourds, plutôt des montées sonores et bruitistes progressives avec beaucoup de larsens, et une batterie tout en improvisation. Puis par dessus Keiji qui rajoute du bruit, hurle, torture sa guitare, et joue parfois du Oboe pour ambiancer un peu la galerie. C'était le 31 aout 1997, et le public a du en prendre plein la gueule ce jour la. La pochette l'atteste de toute façon, surtout que les clubs japonais sont petits mais jouent à des volumes sonores incandescent (Je l'ai vécu...), c'est bien simple, il n'y a pas de limites. Un disque nippon taré, qui aurait pu être dans la new japan serie. Étrangement, la seule collaboration de Boris avec le wizard japonais, tandis que le trio en a sortis des dizaines d'autre avec Merzbow. J'en parlerai prochainement...

vendredi 1 janvier 2021

DAVID SLUSSER - Delight at the end of the tunnel

 

David Slusser a commencé par jouer du saxophone à l'age de 10 ans avant de s’intéresser aux collages de bandes et autres manipulations du son. Il déménage à San Francisco en 1977 aprés avoir obtenu son premier boulot dans l'industrie du cinéma, puis il rejoint la société Lucasfilm en 1984 pour se consacrer à plein temps aux bruitages et autres effets sonores dans les films. Il a travaillé avec David Lynch, Francis Ford Coppola et bien évidemment Georges Lucas. Il rencontre John Zorn au milieu des années 80 et on le retrouve sur quelques disques du patron de Tzadik ("elegy" "dictée/liber novus"...), une relation amicale comme Zorn doit en avoir avec des centaines de musiciens. Slusser commençait à intégrer de plus en plus d'éléments musicaux dans ses effets sonores pour la télévision, et à ajouter plus d'effets de sons dans ses performances musicales; il était à l'aise avec cette ambiguïté jusqu’au jour ou Zorn lui demanda de composer un disque solo pour sa composer serie fraîchement nouvelle. Il dut réfléchir un moment puis se mettra à l'oeuvre avec pour but de mélanger de l’électronique, des effets sonores, des ambiances naturelles, des dialogues, des instruments de musique et des effets de studio, le tout dans une édition digitale. Pas facile à faire mais il releva le défi avec brio. Trés compliqué d’écrire sur ce disque en revanche, un maelstrom sonore indescriptible mais franche fascinant, de la pure musique expérimentale dans la grande tradition de Tzadik (une mention spéciale au dernier titre groovy et déjanté....). En tous cas, j'ai beaucoup aimé et je vous le recommande chaudement. Il semble que ce fut la seule incursion solo de David Slusser, et il semble de nos jours plus s'amuser à jouer du saxophone dans des tribute band à Sun ra !